Parchemin de l'exode

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Atherlad
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Parchemin de l'exode

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Lieu inconnu, date inconnue. Livre de la rédemption.



La haine est une passion qui dévore corps et âme. La mienne et celle des autres a consumé chez moi les deux. Le premier est dans ma tombe engloutie, avec mes frères aux noms oubliés. La deuxième crucifiée aux portes de l’infamie afin de servir d’exemple.
Et pourtant, dans cette non vie de douleur, je ne suis plus que regrets. Comme le guerrier qui se noie dans les océans de larmes qu’il a engendrées.
On m’a nommé : félon, ruine, terreur, meurtrier, rage et destruction. Moi qui n’étais, ne suis, ne serai qu’un jouet dans les mains des dieux, pathétique jouissance des démences du monde.

Quelle belle leçon d’humilité ! Nous qui avions tout, pourquoi avons-nous ainsi sombré ? Nous qui avions tout…
Un grand mensonge, voilà ce que nous étions. Je n’arrive pas encore à me convaincre des horreurs que nous avons commises sur le plan matériel… que j’ai commise…

Nous qui nous disions fils de la paix… quelle ironie… jamais peuple ne forgea autant de lames et ne mena autant de guerres que le nôtre. Pions d’une vengeance millénaire que personne ne voulait voir venir. Bien orgueilleux étions-nous de nous croire à l’abri du destin.
Ces filaments ne sont jamais coupés, car il n’y en a qu’un seul…

Notre marque a souillé à tout jamais l’univers, et pourri le paradis jusqu’à la moelle, au point que même Vaësha ne pouvait plus en voir sa surface. Les vertes pâtures, ces claires rivières et ces hautes montagnes qui me manquent tant. Comment avons-nous pu en arriver là ?

La mer a enseveli les vies, mais pas les souvenirs, ni les plaintes… ni les cris qui hantent toujours mon esprit tourmenté. Je ne trouve plus le repos, leurs visages me poursuivent même de mes yeux éveillés, leurs fantômes murmurent dans mon ombre quand j’ai le dos tourné. Je peux sentir leur regard peser sur moi, comme les flammes brûlantes d’une prochaine condamnation… Ils me suivent…

Puis elle vint. Me regardant d’un air grave elle parla de sa voix claire et parfaite :

« - Ma rancœur n’est pas éternelle Athred, et l’un des tiens m’a prouvé ce que j’espérais. Le combat est terminé, relève-toi, il est temps pour toi de chercher la rédemption… »

*


Combien de temps cette épitaphe avait-elle dormi au-dessus de moi ? Longtemps à l’odeur du linceul… très longtemps… si longtemps que je ne reconnaissais plus rien… pas le moindre brin d’herbe ne m’étais familier. Même l’air semblait différent à respirer.

Ainsi j’étais de nouveau. Telle une réminiscence, dernière représentation du passé, dans l’esprit d’un vieillard…
Le problème avec les rêves, c'est qu'ils sont faits pour être rêvés. [Coluche]
Atherlad
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Lieu inconnu, date inconnue. Livre de la rédemption.




Je me souviens, cette suite de vallons enneigés. Avec quelques arbres dispersés, et des champs en friche attendant le printemps... Et sur chaque petit mont, un hameau de quelques maisons. Avec un petit temple au milieu, et sans doute des greniers aux réserves un peu entamées. Et des bergeries où on garderait les animaux avec du foin et de l’engrais. Où des outils attendraient qu’on leur enlève leur rouille tenace. La campagne...

En flammes… Chaque foyer, chaque village, avait son lot d’incendies… Faisant monter d’immenses colonnes de fumée noire qui envahissait le ciel. Les temples rasés s’étaient effondrés sur les granges et les greniers. Les bergeries étaient sans vie. Le sang des paysans et des animaux se voyait d’aussi loin qu’on pu l’observer. Les arbres coupés avaient fait office de bûcher. Les champs troués ne seraient plus cultivés. Où l’engrais ne serait pas répandu, où la rouille resterait sur les outils. La guerre…

Je n'arrive plus à pleurer. Chaque fois que me reviennes ces pensées je met ma main devant mes yeux, comme pour oublier cette folie qui a commencé, et que personne ne semble en mesure de contenir...
Mais bientôt, dans les ténèbres... d'autres images se reforment... Comme si mes cauchemars ne voulaient nulle part me laisser.
Je n'arrive plus à me détacher de ce long serpent noir qui se détachait, assez proche pour en définir la constitution. Une longue file, d’hommes, de femmes, d’enfants, de charrettes et de bétail. Une immense colonne qui ne semblait pas finir, des réfugiés, par milliers…
Massacrés...

Des cadavres innombrables... du sang qui abreuvait le sol, des rivières qui engloutissaient les vies...

Leurs visages qui me hantent... qui me regardent... qui me regardent...
Le problème avec les rêves, c'est qu'ils sont faits pour être rêvés. [Coluche]
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