[BG] Sinna

[Sinna]

La lune, blafarde, était à son apogée dans un ciel tourmenté. Les rochers meutrissaient mes pieds, et mes parents me tenaient fermement la main, se dirigeant vers une falaise. La pluie battante ne nous permettait pas de voir bien loin, mais je devinais dans le lointain le gouffre, et au fond de celui-ci, une rivière froide et limpide. Je n'avais que cinq hivers, et déjà je devais m'afranchir de l'épreuve finale, une sélection des trolls les plus forts et les plus résistants au sein de ma tribu.

Ce rituel, mon pére me l'avais mainte fois raconté. Je serai jeté du haut d'une falaise surplombant un cours d'eau, et devrai par mes propres moyens en rejoindre la berge, ou je serai acceuilli par les sages et enfin reconnu Troll des Montagnes de la tribu de Gnou'ru.

Ce moment tand redouté était enfin arrivé. Sous mes pieds, de petits gravas tombent et plongent dans un gouffre dont je ne voit pas la finalité, mais j'en devine le fond lorsque retentit le bruit de l'impact des cailloux avec l'eau. Je ferme les yeux, penche la tête en avant, mon corps suit le mouvement, je sens que je glisse, que je tombe, mon estomac se noue, je veux lancer un cris, mais la frayeur m'empêche de prononcer le moindre son. Mon corps est parsemé de mille et une brûlures, poignardé de toute part au contact de l'eau gelée. J'ouvre les yeux, et discerne au loin les torches sur les berges. En levant mon regard, j'aperçois la silhouette de mon pére en haut de la falaise, je ferme à nouveau les yeux, et me laisse entrainer vers le fond.

Je ne sais combien de temps je suis resté inconcient, mais une douce chaleur m'avait éveillé, et, en ouvrant les yeux, je pu distinguer un feu flamboyant dans l'âtre. Deux êtres hideux se tenaient debout au-dessus de moi, ils avaient de longues oreilles et des visages fin, parlant un langage qui m'était incompréhensible. L'un de ses deux êtres s'approcha avec une écuelle pleine d'un liquide chaud au fumet odorant, et l'apporta à mes lèvres, en souriant. Alors, les deux êtres entonnèrent une mélodie langoureuse, qui me plongea dans une harmonie et je m'endormi.

Il me fallu encore trois hivers pour apprendre leur langue. J'appris qu'ils m'avaient découvert à moitié mort de froid sur les berges d'une rivière nommée Sinna, et c'est le nom qu'il me donnèrent. C'étaient des elfes, bien que laids et repoussants, sans musculature, leur âme était pure et bonne. Ils m'ont appris à lire et à écrire, à compter aussi, bien que je n'excelle point dans cet art. Je me rapelle que j'avais beaucoup de peine à étudier par rapport à mes compagnons de classe, probablement est-ce dû à la taille de leur tête, disproportionnée, qui leur permet de mémoriser plus de choses.

J'atteignais mes dix-sept hivers, lorsque je les ai quitté, afin de retrouver ma tribu et mes racines. Très vite, je compris que je ne surviverais pas dans ce monde hostile, je me mis donc au service d'un seigneur : il m'enseigna le métier des armes, l'Honneur, l'Etique et la Miséricorde envers les plus démunis; en échange de cinq hivers à ses cotés afin de protéger son fief.

J'ai maintenant vingt-deux hivers accomplis, ma servitude envers mon seigneur est abolie... et je parcours ce monde à la recherche des miens, de mon passé, de mes racines.