Rumeurs et ragots de comptoirs

[Ashvins]

Dans la taverne d'Avalon, un nain braillard et bourru tenait peu bravement sa choppe, ou plutôt se tenait à elle, dans un vain espoir d'étanche une soif intarissable. Il s'adressait au patron de la gargote, un highlander quelque peu dépressif, qui passait d'avantage de temps à écouter les ragots et élucubrations de ses clients d'un oeil morne et l'air passif, qu'avec grand intérêt...

"T'sais quoi ! L'autre jar c'que j'vu ?! D'sales rats puants, par centaines, par milliers, ça oui ! A l'sortie dz'égouts d'la ville ! J'te jure... j'en aurais fait des brochettes si j'tenais ma hache c'jar là ! J'srai riche, et malade comme un sot 'vec c'tes bestioles-là !

Le patron hocha la tête, sachant pertinement que la dernière hache de l'ivrogne était partie, voilà bien des monas, comme remboursement de dettes. Le nain reprit de plus belle, après avoir vidé une rasade.

"Et Même qu'z'étaient plus là, hier ! Partis... Envolés ! C'pas "trange ça ?! Hein ! Sont sacrément 'ficaces la b'gade sanitaire !"

[Ashvins]

La taverne d'Albion, petite bâtisse à l'orée des bois, repaire de voleurs et peuplé d'hommes louches et de femmes langoureuses.

Un sarrasin bien éméché, maigrichon et aux habits élimés aborde le patron, un highlander fort en chair qui fit dit-on une partie de la réputation de l'auberge.

- "Eh chef, tu m'sers l'même chose ?!"

- "Fais attention, ta note augmente. Tu as de quoi me payer, j'espère ?"

- "Ca, de l'or, j'en ai quand j'veux ! Figure-toi qu'y'a un noble qui traine en ville. Et il donne des pièces rondes et dorées à la volée ! J'aurai qu'à lui d'mander ! Hips ! L'autre jar c'étaient les dockers, z'ont eut droit à 500 pièces chacun, pas une de plus, pas une de moins ! Et un poste d'la Garde, sur l'économie d'monseigneur ! J'lui d'manderai ouais..."

Il s'écroula sur la table, ivre mort.

Un homme habillé de noir qui écoutait la conversation se retourna. Homme d'arme, voleur, brigand ou simple chasseur, il parla fort et distinctement.

- "Eh bien moi, c'est pas un nobliaux que j'ai vu distribuer de l'or. C'était toute une bande. De l'or pour le peuple, contre la tyrannie des Héritiers. Ceux-là qui gardent la monnaie dans leurs coffres, la-haut, dans leur Fort bien gardé."

Le patron lui fit baisser le ton.

- "Tais-toi donc, un garde pourrait passer..."

Un commerçant nain, du haut de sa choppe de bière troll -importée de Midgard- leva les yeux vers le plafond.

- "S'prépare quel'qu'chose ici. Et pas d'bon. J'ferai bien d'pas rester longtemps dans l'coin..."

[Ashvins]

Le patriarche de Caldey écoutait d'un air sage et inquiet le gros troll d'habitude de poste au milieu du village. Il était venu sans le prévenir, comme à son habitude. Fier et direct, ce n'était pas pour déplaire au maître elfe qui reconnaissait les vertues d'efficacité des manières midgariennes.

- "Etrangers Azracs menaçants, approcher du village. Plusieurs hommes tués... Urgh, plus grosses patrouilles nécessaires, plus d'hommes. Sinon ville en danger."

L'elfe avait l'habitude du jargon du troll. Mais rarement il n'avait perçu autant d'insistance dans la nonchalance quotidienne du chef de la garde. Ses années passées à diriger le village lui revinrent en mémoire, jusqu'aux plus anciens cycles, du départ de son Hibernia natale avec le premier groupe de colons. Il leva la tête et regarda le troll avec une détermination confiante et grave.

- "Bien, Azaken. Nous allons de ce pas collecter d'avantages de fonds. Fais en sorte d'enrôler quelques hommes supplémentaires et... soyez vigilants. Il faut assurer la sécurité du village, quelqu'en soit le prix."

Le troll hocha la tête, rocailleuse et brute, et posa sa main gantée d'écailles sur sa hache en guise de salut. Il s'en retourna d'un pas lourd.

[Ashvins]

Même auberge, dans la cité d'Avalon. Un bouquet fané trône sur le comptoir. Une fantaisie de ce highlander un brin dépressif.

Dans le fond de la salle, plusieurs hommes. L'air bourrus, secs, directs et francs. Ces hommes-là sont du peuple, celui qui vit dans la crasse, loin des tables nacrées du Conseil de la cité. L'un d'eux, commençant à peine sa boisson s'adresse à l'un de ses compagnons d'un air moqueur.

- "Eh mon gars, tu vas pouvoir revoir ta belle, à Ambre. Depuis le temps, la Loi l'est plus là, et ma foi c'qui reste, y s'montrent pas. Les routes deviennent sûres c'temps-ci. Tu d'vrais saisir ta chance et prendre l'vent et les marées."

- "Tu parles. Plus de Loi, mais les brigands y sont légion. C'est pas les lucifériens qui font les saletés des légionnaires maintenant, c'est des criminels en tout genre qui t'assassinent au coin de la route."

Un troisième homme de la bande, breton, rétorque.

- "Au moins, y en veulent qu'à ta laine. Pas à ton corps ou à ton âme. Mais si j'étais toi, j'éviterai tout d'même Albion. J'sais pas c'qu'y trafiquent les Héritiers, mais ça sent mauvais. Rien d'pire que l'eau qui dort."