Nuit de chasse.

[Elfae]

Le Valkyn se déplace silencieusement, ombre invisible. Entièrement vêtu de noir, les armes recouvertes de suie pour passer inaperçu, il chasse. Pour le plaisir. Reniflant l'air un court instant, il parcoure des yeux la plaine qui s'étend devant lui. L'odeur de l'ennemi parvient presque immédiatement à ses narines. Un Elfe. Sans doute embusqué, tout comme lui. Ses doigts se referment instinctivement sur le pommeau de son épée. Un battement de cils, et il tient sa stratégie. Il sait que l'Elfe ne se montrera pas sans raison. Alors il va lui en donner une. Une proie.

Il s'avance au centre de la plaine et laisse les ombres s'écouler autour de lui, disparaissant comme les nuées après l'orage. A la seconde où il redevient visible, un sifflement se fait entendre. La flèche se plante dans son épaule avec un bruit mat, transperçant l'armure de cuir sans aucune difficulté. Sacrifice nécessaire. Mais non moins douloureux.

Le Valkyn se rue sur l'Elfe à présent à découvert. Une nouvelle flèche déchire l'air. L'épée du Valkyn la coupe en deux en plein vol. Sans un instant d'hésitation. Une seconde encore, et les deux adversaires sont maintenant au corps-à-corps. L'Elfe délaisse son arc et empoigne deux petites dagues terriblement acérées. Il évite gracieusement l'acier qui le menace et attaque à son tour, visant le visage de l'assassin. Le coup est immédiatement paré, mais la lame glisse sur la garde du Valkyn et lui ouvre une estafilade sur l'avant-bras. Le poison se répand dans ses veines et il sent ses forces s'évanouir instantanément.

L'Elfe lui adresse un sourire railleur, auquel il répond par un grondement sauvage. Sans prêter attention à ses muscles qui hurlent leur fatigue, il attaque avec toute la rapidité et la fureur dont il est capable. Esquive, parade, coups en traître, bottes secrètes, les adversaires ne laissent rien au hasard et utilisent toutes leurs capacités dans ce duel acharné. Leurs lames tissent une armure d'acier impénétrable qui les nimbe de traînées d'argent tandis que l'acier s'entrechoque à une cadence irréelle.

Le Valkyn prend soudain l'avantage quand une habile passe lui permet de cisailler le poignet de l'Elfe, qui lâche sa dague sous le choc. Une lueur d'inquiétude dans ses yeux, la créature aux oreilles pointues continue néanmoins à se battre sans céder un pouce de terrain. L'issue du combat bascule définitivement quand la lame de l'assassin se place sous la gorge de l'Elfe après lui avoir ôté sa deuxième dague. Un sourire découvre les canines acérées du Valkyn, la satisfaction flamboie dans ses yeux. L'Elfe essoufflé ne lui accorde qu'un regard méprisant, résolu à conserver sa dignité jusqu'au bout.

— Qui est la proie, maintenant ? s'amuse le Valkyn, tout en sachant pertinemment que l'autre ne le comprendra pas.

L'Elfe baisse ses yeux sur la lame qui lui impose l'immobilité et crache un mot incompréhensible, comme pour l'inviter à en finir. Un hochement de tête imperceptible, puis l'assassin lui tranche la gorge d'un geste définitif et regarde le corps sans vie s'écrouler au sol. Le goût délicieux de la victoire envahit sa bouche...

... pour être aussitôt remplacé par celui du sang. Le Valkyn contemple avec effarement la lame qui sort de son ventre, le transperçant de part en part. Le rire du sicaire retentit à ses oreilles. Il tombe à genoux sur le sol humide, ses dernières forces le fuyant par la plaie qu'a ouvert la lame de l'Albionnais. Il a gagné... et aussitôt perdu. Crachant du sang, il maudit l'humain opportuniste. Juste avant que la Mort ne le prenne entre ses griffes, une certitude s'impose à lui.

Il y aura d'autres combats.