Les elfes noirs - le peuple oublié des dieux

[Hermès]

Les elfes noirs – Le peuple oublié des dieux

Oublié? Est-ce que les dieux auraient réellement “oublié” une de leurs propres créations? Non, jamais. Ça serait trop simple, trop évident. Il en sortirait une version trop peu hypocrite de la légende des Drow. L'histoire des elfes noirs s'est perdue dans la nuit des temps, et particulièrement après les soi-disant cataclysmes naturels tombés sur le continent d'Atlantis.

Pour rendre justice au peuple exilé, il vaudrait mieux rappeler les faits réels. Ceux dont je suis seul à pouvoir aujourd'hui relater. Les voici donc, ceux que j'ai moi-même vus et entendus, ceux dont je suis témoin occulaire et seul capable de dévoiler en toute objectivité.

La réussite des dieux

Après la création du monde, les dieux décidèrent de le peupler de mortels, mais ne voulurent pas faillir à leur tâche comme auparavant. Ils s'investirent tout particulièrement sur leur première création. En fait, cet effort puissant fut le début de l'histoire Drow. La Lune et le Soleil ne tournaient pas encore autour d'Amtenael lorsqu'ils firent leur apparition. Ces premiers-venus naquirent donc dans la pénombre totale. Ils développèrent une ultra-vision qui leur permettait de voir parfaitement dans le noir. Malgré cet avantage, ils furent exposés à des dangers indescriptibles, entre autres aux esprits qui rôdaient encore sur Amtenael, à l'époque où le monde spirituel et le monde physique n'étaient toujours qu'un. Ils apprirent à survivre, et à résister aux épreuves physiques qui leur étaient imposées. Rapidement, ils développèrent une intelligence et une ruse qui frisait celle de certains esprits. Cela ne prit guère de temps, en fait. Les dieux n'eurent le temps que de se retourner et de poser les yeux à nouveau sur leurs premiers-nés que ces derniers avaient déjà inventé toutes les techniques nécessaires à la survie et même au développement de leur société. Ils s'étaient organisés hiérarchiquement, avaient prestement mis au point bien des techniques pour venir à bouts des esprits malins qui pouvaient tenter de les altérer, physiquement ou psychologiquement.

Lorsque les dieux, satisfaits de leur première création, entreprirent de répéter le procédé, ils créèrent les elfes. Ils se rendirent compte, toutefois, que ceux-ci ne voyaient pas aussi bien dans le noir total que les Drow. Cet avènement coincida avec la venue du soleil autour d'Amtenael. Ce dernier commença à brûler la face de la déesse, mais éclaira également la moitié à laquelle il faisait face. Cela eut pour effet de plaire aux seconds enfants, mais les premiers, n'étant pas habitués à une telle lumière, n'étaient certes pas à l'aise face à une telle clarté. Il se réfugièrent donc là où ils pourraient être hors de porté des rayons lumineux: dans les montagnes. Bien qu'ils pouvaient sortir de ces grottes et s'habituer au soleil, il était plus facile pour eux de rester là où l'ombre avait primauté.

Ils y restèrent un bon temps, et s'y développèrent toujours à une vitesse faramineuse. Ils ne souffrirent jamais de famine ou de maladie et ne connaissaient que très peu le conflit. Leur communication avec les esprits était régulière, et certains d'entre eux réussissaient même à établir des contacts direct avec les dieux. Ce fut l'âge d'or des Drow, un temps qu'ils regretteront toujours. Plusieurs d'entre eux s'habituèrent même à sortir, et ils s'étendirent à nouveau sur une parcelle d'Amtenael. Ils ne rencontrèrent toutefois pas d'autres races durant cette époque. Leurs talents et leurs capacités furent suffisants pour s'assurer un avenir stable, durable et prospère. Rien ne les avait arrêtés jusqu'à maintenant et rien ne semblait effectivement pouvoir y parvenir.

Les premiers contacts

Un temps s'écoula, et les plus curieux d'entre eux voulurent sortir du territoire que les dieux semblaient leur avoir assignés, et aller voir ces autres races dont les créateurs avaient parlé. Ils en avaient entendu des rumeurs de la part des esprits, principalement, mais n'avaient jamais réellement rencontré d'autre chose que des Drow. C'est à cette époque que je vis moi-même des membres du peuple aîné pour la première fois. Ils dégageaient cette aura de grandeur, de respect, de puissance. Ils n'étaient pas souriants, mais jamais on les voyait se plaindre ou être de mauvaise humeur. Manifestement, ils étaient expérimentés, et pour cause: ils étaient immortels. Une qualité qui manquait à beaucoup de races qui avaient été créées depuis tout ce temps. Bien qu'ils se présentèrent comme des “Drow”, beaucoup les surnommèrent “elfes noirs”, pour leurs ressemblances physionomiques avec le peuple sylvain, mis à part pour la peau complètement noire dont ils étaient pourvus. Les premiers contacts furent amicaux, car ils étaient curieux de savoir qui étaient les peuples “cadets” d'Amtenael.

Bien que les débuts furent fort appréciables, ce ne fut pas le cas très longtemps. Hommes en tous genres voyagèrent pour voir le peuple aîné pour ne revenir que frustrés: ils étaient supérieurs en tous points aux autres créations. Ils étaient définitivement plus rapides, souvent plus forts, de loin plus résistants, plus rusés, intelligents, avec des connaissances que peu pouvaient égaler. Ils étaient d'allure fière, jamais laids, et savaient l'art de la fabrication mieux que quiconque. Ils avaient des contacts spirituels fréquents et positifs. Nulle autre race ne leur arrivait au talon.

La déchéance

Tout ce qu'il fallait pour frustrer et énerver les races mortelles les plus imparfaites, donc jalouses, s'incarnait dans une race: les Drow. Peu de temps passa avant que la plupart de ces peuples décident d'ouvertement refuser l'aide que proposait les elfes noirs, par fierté ou par jalousie. Le temps et la corruption finit par éroder les relations amicales qui avaient soudés certains peuples aux Drows. Les quelques années agréables que ces hommes avaient vécu avec leurs grands frères étaient bel et bien passées. Ces derniers, tristes de voir que les hommes étaient trop fiers pour accepter leur aide, décidèrent de se retirer dans leurs terres à nouveau.

Il fallait s'en douter, parmis les hommes, des guerres éclatèrent. Avides de pouvoir et de puissance, des seigneurs bâtirent des armées, et les combats commencèrent à rager d'un côté et de l'autre, et peu de temps passa avant que certains ne découvrent les terres avantageuses du peuple des elfes noirs. Ce territoire et cette prospérité eut l'effet de jeter de l'huile d'envie sur le feu de la haine des hommes. Des rumeurs au sujet des Drow se répandirent, et ce fut suffisant pour rassembler des armées contre le peuple aîné d'Amtenael. Des hommes enragés, hargneux et dont une vengeance personnelle sans but tardait à accomplir, s'amassèrent sur les verdoyantes terres des Drow. Ils y vécurent une effroyable défaite.

Le terme “immortel” était bel et bien complet dans le cas des elfes noirs. On eut beau tenter de les découper, de les éviscérer, les décapiter, leurs corps restaient en un seul morceau, et ils finissaient toujours par se relever, et continuaient de défendre leurs contrées. Une centaine de ceux-ci vinrent à bout d'environ trois mille hommes. Ce fut la première fois qu'ils levèrent les armes contre d'autres hommes.

Si les esprits de la rage et de la folie n'avaient jamais été aussi puissants, il était prévisible que bien pire pouvait encore arriver. Les hommes commencèrent à prier les dieux avec la ferme conviction que ces elfes noirs étaient corrompus, et qu'il ne pouvait être question que de démons, pour tuer 3000 hommes sans broncher. En effet, comme à leur habitude, ils n'avaient pas démontré l'expression de sentiments lors du massacre, et avaient défendu leurs terres sans outre désir.

Une délégation de Drow revint sur les terres des hommes, très peu armés, ayant pour but d'arrêter cette folie, en négociant des pactes de possession des terres. Ils avaient aussi la volonté d'apprendre aux hommes comment faire prospérer leurs peuples et leurs terres aussi bien qu'eux l'avaient faits. Ils furent fort bien accueillis: battus, désarmés, et jetés dans des cachots. Ils étaient ouvertement considérés comme une menace et rien d'autre que des démons qui possédaient tout ce que les hommes devraient avoir.

Évidemment, les Drow ne restèrent pas longtemps en prison: ils trouvèrent rapidement un moyen de s'en évader et ils retournèrent vers leur peuple, leur rapporter les nouvelles diplomatiques dont ils avaient été les victimes. La décision rendue suite à cette tradégie fut expéditive: le contact avec les hommes devait être minimisé au possible, pour la sécurité du peuple. Les Drow avaient toujours respecté les dieux, les esprits, les terres sur lesquels ils étaient. Ils faisaient preuve d'une gratitude constante envers ce qui leur avait été offert depuis leur création. Pour la première fois, ils faisaient face à des problèmes autres que ceux de survie dans lesquels ils avaient été plongés à leur création.

Ces mouvements politiques engendrèrent rapidement une réponse claire dans l'esprit des hommes: les Drow étaient possessifs, égocentriques et n'allaient manifestement rien partager avec les autres peuples. De plus, il était impossible de les vaincre. Les mortels se tournèrent vers le seul espoir qui leur restait: les dieux.

L'exil

Les dieux furent priés intensément, par toute la population dont les ragots avaient eu raison. Les elfes noirs étaient un mal dont il fallait débarasser ces terres. Bien que les dieux hésitèrent longuement avant d'entreprendre quoi que ce soit contre leurs premiers enfants, la pression et la volonté de tous les hommes qui voulaient “leurs” terres “nettoyées” de ce mal incommensurable devenait insupportable. Ils finirent par céder et par accorder cette demande qui provenait de la majorité des hommes de la terre. Cela rétablirait probablement une partie de l'équilibre qui devait régner.

Jamais plus on entendit parler des elfes noirs, et encore moins des “Drow”, une race qui avait été bannie de la surface de la terre, par la volonté corrompue des hommes.

Les Drow furent plongés dans une noirceur totale, dans laquelle ils avaient peine à voir malgré leur don de vision nocturne. Ils se retrouvèrent au centre de la terre, seuls, dans un monde hostile comme jamais personne ne l'avait vécu. Des créatures de feu rôdaient partout, les plantes étaient rares, et les terres cultivables encore davantage. Les elfes noirs furent déstabilisés durant un long temps, et toutes les prières qu'ils avaient l'habitude de réciter ne rapportèrent rien. Durant des centaines d'années, ils subirent la souffrance à laquelle ils ne pouvaient échapper: les créatures de feu étaient hostiles, les esprits démoniaques sur place l'étaient également, et les quelques animaux qui habitaient ces grottes interminables étaient d'une brutalité, d'une violence et d'une résistance que les Drow n'avaient jamais vu auparavant. Étant immortels, ils souffrirent de ne jamais pouvoir connaître la délivrance de la mort. Mâchés durant des semaines par des créatures bicéphales, mis sur des tables de tortures par des esprits démoniaques durant des mois, brûlés dans la lave durant des années... aucun dans le peuple ne fut épargné d'une vie monstrueuse qui dura des centaines d'années.

Lolth: la salvatrice

Jusqu'à ce qu'un seul esprit réponde: Lolth, un Haut-Esprit démoniaque, qui apparu sous forme d'araignée. Elle avait réussi, après tout ce temps, à obtenir l'accord des dieux pour supporter leurs premiers fils. Elle était également la seule qui avait voulu y aller: quel esprit ou dieu voudrait se dédier à une poignée d'hommes désespérés alors que des milliers de mortels n'attendaient que l'avènement d'un dieu à l'extérieur?

Lolth apporta la force qui manquait aux Drow depuis longtemps. Elle leur montra comment utiliser la force de leur désespoir pour se débattre, comment utiliser l'essence de leur haine pour vaincre. Le produit de la souffrance des Drow allait être leur libération, et Lolth montrerait le chemin à suivre. Ils ne tardèrent pas à oublier les dieux qui les avaient oubliés et jetés hors de leur monde, et à vénérer la seule et l'unique Lolth qui les avait aidé à se défendre contre les démons de l'outre-monde.

L'influence de Lolth, avec les centenaires et les millénaires de violence, de survie et de souffrance qui passèrent firent que les Drow perdirent complètement l'essence de neutralité et de simplicité qu'ils avaient. Ils devinrent foncièrement mauvais, n'ayant pour but que de revenir à la surface, réclamer ce qui leur avait été enlevé de droit, par ceux qui ne l'avaient jamais mérité. Les dieux avaient désormais des règles: ils n'intervenaient plus directement sur Amtenael. Circonstance parfaite pour une vengeance contre les fils ingrats des dieux. Ils n'avaient plus qu'un but: se rendre justice, et rendre aux hommes les millénaires de souffrance qu'ils avaient tous endurés.

Toutefois, Lolth n'avait pas des pouvoirs infinis, et n'avait absolument pas la puissance de réouvrir les passages vers la surface qui avaient été scellés par les dieux. La seule méthode qu'elle trouva, qui fut acceptée à contrecoeur par les Drow, fut celle de réincarner ses fils et ses filles dans ce qui était le plus près du peuple noir: les elfes. Ceux qui seraient réincarnés ainsi auraient le sang mélangé à une sève purificatrice qui leur permettrait de vivre en tant qu'elfe normal durant les premières années de leur vie. Après un moment, lorsque cette sève s'écoulerait de leur sang, par blessure, naturellement, leur sombre nature reprendrait le dessus, et leurs souvenirs leur reviendrait. Cette technique ne garantissait certainement pas une arrivée en masse vers la surface, mais avec du temps, plusieurs d'entre eux finiraient par pouvoir se manifester.


Ainsi donc va l'histoire des Drow, le premier peuple des dieux, les elfes noirs... dont les hommes ont été les juges, dont leurs propres créateurs ont été les éxécuteurs. Il y a environ 10 000 ans de cela, cette histoire commençait... et des signes récents annoncent que l'histoire va se poursuivre.

Que les dieux fassent en sorte que les hommes ne soient pas aussi stupides qu'à l'époque... car les Drow ont 8000 ans de torture à redistribuer, et ils n'arrêteront certainement pas avant de récupérer leur dû.

Que les dieux m'en soient témoins, je ne prendrai pas part à ce conflit, comme j'ai eu l'idiotie de le faire si souvent durant les dernières 8500 années.

Malrak